Chimiothérapie intensive : acte 2, expérience périlleuse bis. Je pleure ma liberté.
Quelle épreuve ! Il suffira d'avoir fait deux cures de quatre semaines de chimiothérapie intensive pour avoir perdu 15 kilogrammes. Pour ceux qui me connaissent, ce n'est pas une bonne nouvelle lorsqu'on sait que je faisais 65 Kg pour 1m89, il y a deux mois ! J'ai fondu comme neige au soleil jusqu'à perdre ma masse musculaire. Je suis rachitique, maigrelet, je tiens à peine sur mes deux cannes lorsque je vadrouille dans mon appartement de pièce en pièce. Bref, le traitement me bouffe. Il faut ce qu'il faut pour éradiquer le mal. Alors j'accepte.
Cette fois-ci la chimiothérapie ne ressemble pas à la première, ce sont des molécules différentes. Avant de commencer de recevoir les produits dans mon corps, je me dois d'être patient deux jours. Je rentre dans une période d'hydratation. Il faut que mon corps soit dans l'eau afin de faciliter l'évacuation de la chimiothérapie lorsqu'elle me sera administrée. Lundi, le protocole se met en place, il y a trois molécules différentes que l'on me passe en douze heures chaque jour pendant cinq jours pleins. Vendredi, je suis détruit. Je vomis dans l'excès. Niveau fatigue, je suis au maximum. Tellement je gerbe, je sens mon corps se détruire petit à petit de l'intérieur. J'ai mal.
Deuxième semaine, je rentre en aplasie. Je m'estime plus chanceux que la première fois, la mucite est moins forte. Mais... Les effets secondaires de la chimiothérapie persistent. On ne peut pas gagner sur tous les plans ! Je continue à vomir. J'arrête de manger. Je tiens grâce à l'alimentation par intraveineuse. Mon corps souffre, c'est global comme sensation. Le traitement m'enfonce au creux de mon lit, je perds du poids, ma peau s'asséche, je pèle. Le temps est long, l'enfermement me rend dingue, je pense trop. La collaboratrice du cancer est là : la peur. Je suis effrayé. De quoi ? De tout.
Troisième semaine, Les vomissements s'estompent mais... J'ai l'intime sensation que mon corps lâche d'un cran. La chimiothérapie me crée des séquelles internes. Je souffre trop du ventre. Ce que c'est vague. Et pourtant, je douille. Mon autonomie disparait, je me sens comme une andouille. Les médecins commencent à prendre immédiatement au sérieux mes remarques. Le ballet des examens est ouvert, cette farandole de mauvais goût m'exténue car je cumule la douleur et la fatigue. Échographie, scanner abdominaux pelvien et la surprise du chef une fibroscopie ! Beurk. Quel traumatisme de recevoir un tube avec au bout une petite caméra au fond de sa gorge ! Surtout qu'il poursuit sa route dans mon for intérieur irrité. En effet, la conclusion de l'examen m'apprend que la chimiothérapie m'a créé un joli ulcère et que mon oesophage est abîmé, toujours à cause de l'agressivité de ce traitement de cheval. Évidemment, je comprend mieux pourquoi je suis tordu en quatre dans mon lit. Je suis sous anti-douleur. J'ai mal. J'attends que ça passe.
Quatrième semaine, je ressemble à rien, une chose est sûre, ce n'est plus vraiment moi. Physiquement délabré, mon moral suit cette tendance néfaste. Je craque. Les douleurs s'estompent mais l'enfermement me pèse. Le fait de ne plus manger me contrarie car dans ma tête je veux manger. Mais mon corps n'en est pas capable. Alors je zappe les chaines de tv et j'éteins, car j'y vois de la bouffe pleins l'écran. ça me file la nausée. Et je pleure. Je pleure. Même lorsqu'on me téléphone, même lorsqu'on vient me voir. Je pleure sans cesse. C'est le summum de la souffrance. Ma résistance descend d'un cran. Bref, je pleure jusqu'au jour de la libération où une fois dehors, plus de larmes, juste l'envie de respirer et d'être enfin en paix un court moment. Une semaine seulement, car après il faut y retourner. Encore ! Oui, mais ce sera la dernière fois - si tout va bien.
1 Comments:
Cure d'hydratation et mesna, nausees et zophren, ... Le plus important est certainement l'equipe d'encadrement de l'etablissement de soins, ainsi que la presence des amis. Ce qui permet de ne pas trop s'ennuyer, on en a vite marre de la tele. Quant a la perte de poids, il faut faire attention quand on a fini les traitements, car on a tendance a manger plus qu'il ne le faudrait et finalement on monte plus haut que son poids normal. Surtout si des corticoides (du genre Solumedrol) sont injectes aussi pendant la chimio pour aider contre les nausees.
Espoir. Et surtout courage, car il en faut pour affronter la vie quand on est deja affaibli physiquement a 20 ans.
Anaximandre
Enregistrer un commentaire
<< Home